ssoabs - burning then
Avec Louidgi Beltrame, Christoph Draeger, Oscar Farfán, Raphaël Grisey et Marine Hugonnier
Prologue * Tony Morgan
Prologue * Tony Morgan
Médiathèque du FMAC
15.09 – 12.11.2017
Le 16 juillet 1945, la première bombe atomique de l’Histoire explose dans le désert du Nouveau-Mexique, aboutissement du projet Manhattan initié
en 1942 par les États-Unis. Élaboré en lien avec le Royaume-Uni et le
Canada, le projet resta longtemps confidentiel, les ouvriers ne sachant
pas eux-mêmes ce sur quoi ils travaillaient. Ça n’est que lorsque les
bombardements américains eurent lieu les 6 et 9 août 1945 sur les villes
japonaises d’Hiroshima et de Nagasaki que le monde découvrit la
puissance de l’arme atomique et le désastre humain et environnemental
que représente cette invention.
Au-delà de la remise en cause de cette avancée scientifique en tant que « progrès », de nouvelles pensées se mettent en place au lendemain des bombardements – tant écologiques, économiques que scientifiques – et provoquent également un bouleversement dans le domaine de l’architecture.
Au-delà de la remise en cause de cette avancée scientifique en tant que « progrès », de nouvelles pensées se mettent en place au lendemain des bombardements – tant écologiques, économiques que scientifiques – et provoquent également un bouleversement dans le domaine de l’architecture.
Ainsi, à la fin de
la seconde guerre mondiale, l’architecte américain Oscar Newman dessine
le plan d’une large sphère, ville souterraine située sous New York ; si
ce projet appartient à l’utopie architecturale plus qu’à la réalité, il
est symptomatique des nombreux projets d’habitats comme de défenses
développés pendant la période de guerre froide qui suivit. Certaines de
ces architectures sont encore debout, d’autres sont à l’état de vestiges
et d’autres encore ont disparu, volontairement enfouies, selon la
volonté de gouvernements d’effacer les témoins d’un temps qui ne
correspondraient plus à l’image du présent[1].
Qu’il soit culturel, naturel ou construit, le paysage est porteur
d’histoires, accumulant le poids du passé dans des marques visibles ou
invisibles, matérielles ou non. Parallèlement à l’évolution climatique
et à l’utilisation excessive des ressources qui se sont dramatiquement
accélérées depuis le siècle dernier, les conflits et les catastrophes
apportent aussi leurs empreintes aux paysages.
Gardant mémoire de ce
qui se passe sur son sol, le paysage est témoin autant que partenaire
des événements historiques – partageant des liens étroits
d’interdépendance et des interactions constantes avec les hommes qui
l’habiten
t. burning then rassemble ainsi des pièces d’artistes qui se
sont concentrés sur des lieux, en Ukraine, en Allemagne, en Afghanistan
ou au Guatemala, où le passé transparaît encore dans un processus
d’érosion, plus ou moins visible selon les histoires qui les ont
marqués, selon la résilience de la nature et des gens, la volonté des
habitants, des historiens et des artistes eux-mêmes. Témoins de
mouvements politiques et de conflits passés, de catastrophes plus ou
moins récentes, les territoires explorés par les artistes montrent que
l’histoire est encore présente, à vif, et continue d’agir, même de
manière souterraine, silencieuse, qu’elle continue de brûler.
Paradoxalement,
au pire des catastrophes la vie ne disparaît pas toujours, et continue
elle aussi de persister. Certains arbres morts repoussent sur les
terrains entièrement calcinés, des années plus tard ; dans la zone
d’exclusion de Tchernobyl, à l’abri des activités humaines après
l’accident, se serait aussi développée une faune sauvage exceptionnelle,
apparemment en bonne santé malgré le taux immense de radiations…
[1] Les récents débats aux États-Unis concernant les statues de personnalités actives lors de la guerre de Sécession et
favorables à une Amérique blanche témoignent de l’actualité de ces questions.